Après Jaramana, les affrontements communautaires sont passés à Sahnaya, dans le rif de Damas, en dépit de l’accord scellé mardi soir entre des représentants du gouvernement syrien et les responsables druzes.
22 personnes ont été tuées dans cette ville située à 15 kilomètres au sud-ouest de Damas, où des affrontements ont éclaté dans la nuit, au lendemain d’accrochages dans la localité à majorité druze de Jaramana qui ont fait 17 morts, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). L’ONG indique que 6 tués appartiennent la communauté druze et 16 aux forces de sécurité et les forces auxiliaires.
Les combats qui impliquent des groupes druzes et des factions liées au pouvoir, selon l’OSDH, ont été déclenchés après la diffusion sur les réseaux sociaux d’un message audio attribué à un druze et jugé blasphématoire à l’égard du prophète Mohammad.
Le spectre des massacres des alaouites
Ces violences ont réveillé le spectre des massacres qui ont fait plus de 1.700 morts, en grande majorité parmi la minorité alaouite dont était issu le président déchu Bachar al-Assad, renversé en décembre par la coalition islamiste à présent au pouvoir.
« Nous n’avons pas dormi de la nuit (…) les obus de mortier s’abattent sur nos maisons », a déclaré à l’AFP au téléphone Samer Rafaa, un habitant de Sahnaya, où une partie de la population est druze.
« Où sont les autorités ? Nous les implorons d’assumer leur rôle (…) les gens meurent et nous avons des blessés », a-t-il ajouté.
Damas : « Des groupes hors-la-loi »
Une source du ministère de la Santé selon laquelle 11 personnes ont été tuées et d’autres blessées imputent les tirs à des « groupes hors-la-loi qui ont pris pour cible les civils et les forces de sécurité dans la région de Sahnaya ».
Selon l’agence Sana, il s’agit de 5 membres des forces de sécurité qui ont été visés par des francs-tireurs relevant de groupes armés et de six autres personnes qui se trouvaient dans une voiture prise pour cible par ces groupes, a précisé le directeur des relations publiques du ministère de l’Information, Ali al-Rifaï.
Dans l’après-midi de ce mercredi, « les forces de la Sûreté générale sont entrées dans la plupart des quartiers de Sahnaya où elles ont opéré des opérations de ratissage contre des sites contrôlés par des hors-la-loi », a rapporté la Direction de sécurité de la province de Damas.
Appels à la mobilisation
Des sources locales ont révélé que les mosquées de la Ghouta orientale à l’est de Damas ont lancé des appels à ceux qui peuvent porter des armes pour se rendre aux fronts de combat à Jaramana et Sahnaya. Des convois des factions armées ont été envoyés depuis les gouvernorats de Hama et d’Idleb dans le nord syrien vers ces deux villes, selon ces sources.
Intervention israélienne

Fait marquant : ‘Israël’ est intervenu mercredi dans ces violences confessionnelles au motif de protéger la communauté druze.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ministre de la Défense, Israël Katz, ont annoncé conjointement que l’armée avait mené « une action d’avertissement » contre un « groupe extrémiste qui se préparait à attaquer la population druze de la ville de Sahnaya ».
« Dans le même temps, un message ferme a été adressé au régime syrien: Israël attend de lui qu’il agisse pour protéger la communauté druze », a ajouté le texte.
L’attaque israélienne a été menée au moyen de drones, a précisé l’Organisation de radiodiffusion israélienne.
Le ministère syrien de l’Intérieur a fait état de deux raids aux drones israéliens qui ont pilonné un rassemblement des forces de sécurité aux périphéries de Sahnaya, causant la mort d’un élément.
« Velléités israéliennes de semer la sédition ».
Dès la chute d’Assad le 8 décembre, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël occupé et contrôlé de large pans dans les trois gouvernorats du sud, Quneitra, Souweida et Deraa. Ses dirigeants ont multiplié les gestes d’ouverture envers la communauté druze.
Début mars, à la suite d’escarmouches à Jaramana, ils ont menacé d’une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes, qui se sont engagées à protéger les minorités, s’en prenaient aux druzes.
Les dignitaires druzes avaient immédiatement rejeté ces propos, réaffirmant leur attachement à l’unité du pays multiconfessionnel et mettant en garde contre « des velléités israéliennes de semer la sédition ».
Leurs représentants négocient actuellement avec le pouvoir central à Damas un accord qui permettrait l’intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.
Intervention des druzes israéliens
Selon la télévision d’information libanaise al-Mayadeen, des druzes du Golan syrien occupé ont franchi ce mercredi la bande frontalière pour exprimer leur solidarité avec les druzes de Sahnaya.
Leur guide spirituel en Israël, cheikh Mwafaq Tarif avait réclamé « une intervention immédiate de la part de l’armée israélienne pour empêcher un massacre imminent à l’encontre des villages druzes syriens ».
Accusations contre Damas

A Souweida, une manifestation protestant contre les agressions à Jaramana et Sahnaya a eu lieu dans la place de la ville. Les manifestants ont scandé des slogans qui imputent au gouvernement syrien la responsabilité de l’escalade.
Le Conseil militaire du gouvernorat de Souweida a affirmé que « l’escalade terroriste » à Sahnaya et Jaramana relèvent de la responsabilité de « l’autorité de fait accompli à laquelle nous nous opposons ».
« La complicité et le silence de ces parties constituent un partenariat clair dans l’incitation et la perpétration des crimes dirigés contre nous, les druzes, en particulier, ce qui menace l’unité du tissu national syrien dans son ensemble », a déploré son communiqué.
Un autre groupe de Souweida, « la brigade de la montagne » a averti « l’administration à Damas qui prône le double standard et a intérêt à permettre les conflits sectaires».
« Son incapacité à arrêter les attaques des takfiris et des terroristes qui lui sont fidèles sur Achrafieh Sahnaya la tiendra entièrement responsable de tout ce qui se passera ensuite», a-t-il déploré.
Pendant les obsèques de sept combattants druzes tués à Jaramana ce mercredi, des participants brandissaient le drapeau druze aux cinq couleurs, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Source: Divers