Sur une route défoncée, près du camp de réfugiés de Jénine où elle vivait, Saja Bawaqneh raconte qu’elle s’efforce de retrouver espoir, cent jours après le début d’une offensive israélienne en Cisjordanie occupée, qui l’a forcée à fuir.
Des dizaines de milliers de Palestiniens ont été déplacés dans le nord de ce territoire depuis qu’Israël y a lancé, le 21 janvier, la vaste opération Mur de Fer, qualifiée « d’antiterroriste ».
Le camp de Jénine est l’un des trois visés par cette opération, avec ceux de Tulkarem et Nour Shams.
Ce jour-là, la vie de Saja Bawaqneh a basculé. « Nous essayons de nous accrocher à l’espoir, mais malheureusement, la réalité n’en offre aucun », témoigne cette femme.
« Rien n’est clair dans le camp de Jénine, même après cent jours. Nous ne savons toujours pas si nous retournerons dans nos maisons, si elles ont été endommagées ou détruites ».
Les habitants, dit-elle, ont interdiction de rentrer. « Personne ne sait ce qui s’est passé à l’intérieur » du camp, ajoute-t-elle.
Fin février, l’armée d’occupation israélienne a déployé des chars à Jénine, pour la première fois en Cisjordanie, occupée par Israël depuis 1967, depuis la fin de la seconde Intifada en 2005.
Début mars, elle a déclaré avoir étendu son offensive à d’autres quartiers de la ville.
Le camp de Jénine est connu pour être un bastion des groupes de resistance palestiniens et les forces d’occupation y ont toujours mené des opérations.
Mercredi, des images de l’AFP ont montré des lignes électriques suspendues au-dessus de rues bloquées par des barrages en terre. Devant l’hôpital gouvernemental de Jénine, des eaux usées se déversent sur la route.
« Cent ans »
Farha Abu Al-Hija, membre du Comité populaire pour les services dans le camp de Jénine, raconte que des familles vivant aux abords du camp sont contraintes chaque jour de quitter les lieux.
« Cent jours se sont écoulés, comme si cela faisait cent ans pour les personnes déplacées du camp de Jénine », ajoute-t-elle. « Leur situation est désastreuse, les conditions sont dures et ils n’avaient jamais connu auparavant une telle douleur ».
En mars, Médecins sans frontières a dénoncé la situation « extrêmement précaire » des Palestiniens déplacés par l’offensive israélienne, affirmant qu’ils étaient « privés d’abris convenables, de services essentiels et d’accès aux soins ».
Selon MSF, l’ampleur des déplacements forcés et de la destruction dans les camps est sans précédent « depuis des décennies » en Cisjordanie.
Selon les Nations unies, environ 40.000 habitants des camps ont été déplacés depuis le 21 janvier.
Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a déclaré que l’offensive durerait plusieurs mois et a ordonné à l’armée de ne pas laisser les habitants rentrer chez eux.
Fin avril, les forces israéliennes ont érigé des barrières à plusieurs entrées du camp de Jénine.
Leur offensive avait débuté deux jours après l’entrée en vigueur d’une trêve, le 19 janvier, dans la bande de Gaza entre Israël et le Hamas.
Deux mois plus tard, cette trêve a volé en éclats quand l’armée israélienne a repris son offensive à Gaza.
Déjà, avant le début de la guerre le 7 octobre 2023, la violence flambait en Cisjordanie où plus de 200 Palestiniens étaient tombés en martyrs.
Depuis le 7 octobre, au moins 925 Palestiniens y ont été tués par des soldats ou des colons israéliens, d’après les chiffres du ministère de la Santé palestinien.
Dans le même temps, au moins 33 Israéliens, dont des soldats, ont été tués en Cisjordanie dans des attaques palestiniennes ou lors d’opérations militaires, selon les données officielles israéliennes.
Source: Avec AFP